A la rencontre d’Alain DONNAT
(Photo : Le Bien Public)
Le District de Côte-d’Or est allé à la rencontre d’Alain DONNAT, le professeur d’EPS qui a reçu un hommage formidable le jour de son départ à la retraite, et dont la vidéo a fait un buzz planétaire ! Ce moment magique revient dans l’actualité avec la sortie de son livre « Une haie d’honneur pour un prof » aux éditions Maïa.
Dans cette interview, il se confie sur son parcours et son histoire personnelle. Il évoque sa passion pour le football et tous ses bons moments vécus au sein du club du Réveil d’Is-sur-Tille, du Sporting Club de Selongey, et maintenant d’Is-Selongey Football ; 35 années passées dans son club de cœur, sans oublier les 2 années comme responsable des jeunes au CDF (Cercle Dijon Football), et une année comme responsable de la post-formation au DFCO. Il retrace sa carrière de prof d’EPS (37 années) au Collège Paul Fort d’Is-sur-Tille, sa vie de famille et son implication dans la vie associative locale pendant cette même période.
C’est un récit de vie riche en émotions, plein d’espoir et de résilience. Il nous questionne sur notre philosophie de la vie, et nous invite à savourer les moments simples de la vie. C’est un plaidoyer pour cette quête du simple bonheur et de la simple signification de la vie. Il nous confirme « que nous enseignons autant ce que nous savons que ce que nous sommes !« .
« L’écriture m’a permis de me découvrir, de mieux me connaître, de comprendre le sens de mon engagement auprès des autres, des gens, des enfants. Ma vie m’a amené à relever des défis, à sublimer la douleur, à apprécier des moments de bonheur. J’ai toujours souhaité construire, en mettant en place des fondations solides basées sur la qualité de la relation humaine, les valeurs de solidarité, de tolérance, d’exigence. Cette entreprise nécessitait d’être patient et de prendre le temps nécessaire afin de créer « un état d’esprit » qui permette à chacun de se sentir intégré à la vie du club, quel que soit son rôle ou son statut. »
Interview d’Alain DONNAT, réalisée par Keryann Lechenet (District 21) :
Alain, quand et pourquoi tu as décidé d’écrire ce livre ?
Alain DONNAT : Un journaliste, venu faire un reportage pour l’Equipe Magazine, suite « au buzz planétaire », prit des nouvelles du jeune retraité. Au cours de l’entretien, il me posa une question sur mon enfance. Ma réponse l’interpella au point de me proposer d’écrire mon histoire dans un livre. Ce projet me semblait éloigné de mes compétences, bien que j’aie toujours aimé écrire. En effet, il me semblait difficile et présomptueux d’endosser le costume d’auteur. Quelques 4 ou 5 mois plus tard, je décidai de me lancer dans l’aventure de l’écriture. A l’origine, mon but était plutôt d’engager une forme de thérapie, mais aussi de répondre à une question des journalistes qui revenait sans cesse dans les interviews : Monsieur DONNAT, comment expliquez-vous cet évènement et ce témoignage des élèves ?
C’est ainsi que je repris le film de ma vie, les événements, les émotions qui avaient contribué à façonner ma personnalité et influencé ma vision des statuts d’enseignant d’EPS et d’entraîneur de football, et d’athlétisme. Le décès de mon frère, le jour de mon anniversaire, a marqué ma vraie naissance. Il est parti à l’âge de 14 ans, j’avais 7 ans. Mes enfants m’ont encouragé à poursuivre ce travail qui resterait un témoignage pour eux, mais aussi pour mes petits-enfants.
Je fis lire mon manuscrit à certaines personnes : anciens élèves, collègues, parents, proches… et tous me conseillèrent d’éditer ! Alors, je me suis « pris au sérieux » et décidai de tenter l’aventure, en proposant « le livre » à certains éditeurs, sans rien connaître de ce milieu. Ce livre, c’est un moyen de parler et de faire revivre mes proches qui sont partis. C’est aussi témoigner de notre reconnaissance pour toutes ces personnes qui s’impliquent dans les clubs, les bénévoles, les éducateurs dans les associations sportives, culturelles, sociales, celles et ceux à qui nous ne témoignons que trop rarement toute la considération qu’ils méritent. Ce récit de vie rappellera à d’autres personnes des moments douloureux de la vie mais aussi de joie. Ce récit de vie porte un message d’espoir.
J’ai toujours considéré l’éducation physique et sportive, le football, l’athlétisme, comme un moyen d’éducation, de transmission de valeurs mais aussi un terrain propice pour acquérir des compétences, qui puissent aider chacune et chacun de s’exprimer, de se sentir intégré à un projet commun, à travers la notion de groupe, d’équipe, de collectif. La vie associative, la vie de club, c’est aussi la convivialité basée sur la qualité des relations humaines. Je ne pense pas qu’il faille opposer le milieu amateur au milieu professionnel, ils sont complémentaires, et génèrent des émotions que nous avons plaisir à partager. Pour moi, la réussite sportive passe par « l’état d’esprit », les valeurs, la relation aux autres, par notre faculté à nous enthousiasmer devant le plus petit progrès ou résultat, par notre faculté à ressentir et à partager nos émotions.
De quoi parle le livre ?
AD : C’est un récit de vie. L’histoire d’un gamin, du quartier Saint-Jacques de Clermont-Ferrand qui grandit dans un milieu familial marqué par la douleur de la perte d’un fils, un frère. Il va essayer de se construire et de s’épanouir à travers l’activité sportive initiée dans la rue, dans son HLM, puis au sein de son club le Stade Clermontois, aussi bien en athlétisme où il obtiendra 3 sélections en équipe de France juniors, qu’en football où il jouera 3 saisons pleines en équipe fanion, en 3ème Division nationale. Ses études chaotiques, le conduiront à décrocher le CAPEPS et à devenir professeur d’éducation physique. Après 2 années à Courbevoie, il sera nommé au collège Paul Fort d’Is-sur-Tille où il s’investira conjointement dans son collège et dans la vie associative locale. Il relate son parcours d’enseignant et d’entraîneur de football pendant ces 38 années au service des enfants et adultes au « PAYS DES 3 RIVIERES ». Les douleurs de la vie ne l’épargneront pas. Malgré les malheurs de la vie, ses valeurs ne cesseront jamais de l’animer et formeront un véritable guide de son existence, convaincu que le respect d’autrui, la tolérance, la solidarité nous rendent meilleurs les uns les autres.
La recherche d’une maison d’édition a été compliquée ?
AD : Je ne connaissais pas du tout le monde de l’édition. J’ai reçu quelques conseils de collègue qui avaient publié et j’ai envoyé le tapuscrit par mails, sans me faire trop d’illusions, sachant qu’il n’y avait pas plus de chance de trouver un éditeur que de gagner au loto. La bonne nouvelle arriva : les éditions Maïa affichèrent un intérêt à mon histoire et me proposèrent de publier : « Une haie d’honneur pour un prof ».
Combien de temps as-tu mis pour écrire ce livre ?
AD : Je l’ai écrit, lu, corrigé, réécrit, relu, recorrigé une trentaine de fois, passé quelquefois plus d’une heure sur un phrase afin que la formulation me convienne et illustre les émotions ressenties. Il m’a fallu 2 années avant de proposer le livre.
Quelles sont les difficultés que tu as rencontrées ?
AD : J’ai toujours bien aimé écrire mais je n’avais pas la prétention d’écrire un livre. J’ai eu besoin de conseils surtout pour la concordance des temps, le choix des mots, le vocabulaire, éviter les répétitions, être attentif à la syntaxe, à la cohérence des différents paragraphes.
Selon toi, quelle est la clé pour réussir l’écriture d’un livre ?
AD : Je n’ai pas la prétention d’avoir réussi. J’ai simplement essayé de faire du mieux que je pouvais. J’ai choisi la voie de l’authenticité pour communiquer, exprimer mes émotions, et définir le sens donné à ma vie. C’est, pour moi, le chemin à suivre pour nous montrer tel que nous sommes, afficher notre personnalité avec nos fragilités et nos failles qui sont aussi notre richesse, avec nos forces et nos faiblesses.
Quelle est la signification de la couverture ?
AD : Chacun peut y voir ce qu’il souhaite en fonction de ses représentations, son imaginaire. J’aime bien le côté impersonnel, cette forme de solitude à laquelle les enseignants, les éducateurs ont été confrontés dans cette période de pandémie. La personne : il peut être enseignant, coach, éducateur… la vue de dos symbolise le départ… J’aime bien la couleur du fond, verte, qui représente un terrain de foot où j’ai vécu et partagé de grands moments. Le vert symbolise aussi l’espoir qui nous guide et sans lequel nous ne pourrions nous engager dans notre mission d’éduquer. J’ai attaché beaucoup d’importance au texte de la 4éme de couverture. Le fond du décor me rappelle « une haie » ! Et un souvenir de vie !
Et le titre alors ?
AD : Quand j’ai eu fini d’écrire, j’ai demandé à mes proches de me proposer un titre. J’ai retenu celui de Dénis qui mettait en valeur les enfants et notre jeunesse avec « la haie d’honneur », et le terme « prof » avait pour but de valoriser le travail des enseignants, sans oublier les éducateurs et tous les partenaires de la communauté éducative, qui ont besoin de respect, de reconnaissance et de considération.
Quels sont les messages que l’auteur veut faire passer à travers ce livre ?
AD : C’est un récit de vie qui illustre la part de résilience dont l’auteur fait preuve pour continuer à exercer ses missions d’enseignant et d’entraîneur de football et d’athlétisme. J’insiste sur l’importance de la qualité de la relation humaine, sur les valeurs éducatives qui forgent un état d’esprit. L’individu s’exprime et s’engage pleinement que s’il se sent intégré au projet commun, à son groupe, à son équipe, à son club. « Le plaisir ne vient que par l’exigence ». Optimiser les ressources de chacun est facilité par une attitude pédagogique empreinte de fermeté et de bienveillance, où l’animation, l’enthousiasme de l’encadrant, les encouragements sont essentiels pour engager les efforts, quel que soit le niveau de pratique, ou le statut.
Notre mission nous impose de faire attention à tout le monde, pour cela il nous faut proposer des contenus adaptés au niveau moteur et à l’intérêt des élèves ou des joueurs. La vie m’a appris à relever les défis, à ne pas choisir la facilité, mais à affronter la difficulté, à s’engager à fond. L’aventure de l’écriture m’a permis de mieux me connaître, de comprendre le sens que j’ai donné à ma vie. Les douleurs personnelles ont influencé ma façon de concevoir mes fonctions d’enseignant et d’entraîneur, avec bienveillance et exigence. Je n’ai fait que rendre ce qu’on m’a donné. Je me suis enrichi de mes expériences dans des milieux différents, des rencontres. Je ne remercierai jamais assez mes proches, ma famille de m’avoir autorisé à vivre ma passion pour le sport, pour le football, pour les gens.
Enfin, ce livre représente une opportunité pour réfléchir sur notre action auprès de notre jeunesse, des adultes, de mettre en valeur le métier d’enseignant, d’entraîneur, d’éducateur. Ce livre est aussi dédié à tous mes êtres chers qui ont disparu, c’est une manière pour moi de les faire revivre. C’est aussi affirmer ma conviction selon laquelle la dimension affective de la relation est au centre de toutes nos préoccupations. Je reprendrai cette citation d’un ami, Alain PIRON : « Nous enseignons autant ce que nous savons que ce que nous sommes« .
Où peut-on acheter votre livre ?
Dans toutes les librairies… à Is-sur-Tille, la petite Librairie « Mots de Plumes » où j’ai fait une journée dédicace le samedi 25 septembre, à la FNAC, Cultura… On peut le commander aussi sur le site des éditions Maïa.
Keryann LECHENET